• Applications thérapeutiques de la méditation

    Applications thérapeutiques de la méditation

     

    Section Applications thérapeutiques
    Recherche, rédaction et révision scientifique : Dr Sylvie Dodin, M.D., M. Sc. et Claudine Blanchet, Ph. D., Chaire en approche intégrée en santé, Université Laval.
    (avril 2011) éditée sur www.passeportsante.net.

     

    Diverses recherches ont montré que la méditation engendre des conséquences physiologiques, surtout caractérisées par le ralentissement du métabolisme (baisse des rythmes cardiaque et respiratoire, baisse de la production de gaz carbonique, diminution de la tension musculaire, ralentissement des ondes cérébrales). De plus, la relaxation et la réduction du stress que peut procurer la méditation pourraient avoir des bénéfices préventifs et thérapeutiques sur la santé. Les techniques les plus étudiées sont la méditation transcendantale et la méditation de pleine conscience (Mindfulness-Based Stress Reduction).

     

    La Réponse de relaxation, particulièrement efficace contre le stress, a aussi beaucoup été étudiée. Elle n’est toutefois généralement pas considérée comme une technique de méditation par les chercheurs. Ainsi, elle n’était pas incluse dans les recherches qui suivent et fait l’objet d’une fiche distincte dans ce site.

     

    En 2007, un rapport d’envergure, intitulé Effectiveness of Meditation in Healthcare, a été réalisé au Canada, à l’Université de l’Alberta. Sous l’égide des National Institutes of Health (NIH) américains, des chercheurs ont réalisé une revue exhaustive des articles scientifiques publiés sur les effets, les mécanismes et les bénéfices thérapeutiques potentiels des différentes techniques de méditation.

    Après avoir passé au crible 2 285 études, ils en ont retenu 813 qui répondaient à leurs critères de qualité. Les auteurs ont constaté que malgré plusieurs résultats intéressants, beaucoup d’incertitudes entourent la pratique de la méditation. Les recherches scientifiques sont fréquemment discordantes, elles ont peu de bases théoriques communes et souffrent très souvent de graves lacunes méthodologiques. De plus, certaines recherches ont évalué concurremment d’autres approches avec la méditation, ce qui empêche d’établir les effets spécifiques de cette dernière. Les auteurs ont dû conclure que sur la base des données scientifiques actuelles, il n’était pas possible de statuer sur l’efficacité de la méditation en matière de soins de santé.

    En 2010, les résultats d’une nouvelle revue systématique de la littérature scientifique, incluant 748 études, sont venus confirmer ces conclusions.

    Recherches

     

    Améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de cancer.

    Une méta-analyse, publiée en 2009, a répertorié 10 études (4 études cliniques aléatoires et 6 études observationnelles) qui portaient sur la méditation de pleine conscience (Mindfulness-Based Stress Reduction). Les résultats montrent plusieurs améliorations comme la réduction du stress, moins d’anxiété et de fatigue, un meilleur sommeil et un plus grand bien-être. Cependant, en ne considérant que les études cliniques aléatoires, seules les améliorations des paramètres psychologiques ont été notées.

    Après la publication de cette revue, une autre étude clinique aléatoire a évalué la méditation de pleine conscience sur le stress et la qualité de vie chez les femmes survivantes d’un cancer du sein. Ainsi, 84 femmes ont été séparées au hasard en 2 groupes. L’un recevait 6 semaines de méditation tandis que l’autre, servant de groupe témoin, recevait les soins usuels. Les résultats observés après 6 semaines montrent des niveaux plus faibles de dépression, d’anxiété et de peur de récidive chez les méditantes, comparativement aux femmes du groupe témoin. De plus, elles présentaient des niveaux plus élevés d’énergie et des capacités fonctionnelles augmentées.

     

    Réduire le stress et l’anxiété. En 2008, une revue de la littérature scientifique a été publiée au sujet de la méditation de pleine conscience (Mindfulness-Based Stress Reduction). Les auteurs ont conclu que cette technique (généralement testée après des périodes de pratique de 8 semaines) réduisait efficacement le stress et l’anxiété. Cela se produirait tant chez les personnes en bonne santé que chez celles souffrant de maladies chroniques.

    Par contre, 3 autres revues systématiques publiées en 2006 (révisée en 2009), en 2007 et en 2009 ne tenant compte que des études contrôlées, concluaient que la méditation de pleine conscience n’avait montré aucun effet fiable contre la dépression ou l’anxiété. Le manque d’études de bonne qualité fait en sorte qu’il demeure très difficile de se prononcer avec certitude sur l’efficacité de la méditation pour traiter l’anxiété.

     

    Prévenir les troubles cardiovasculaires. Une étude clinique aléatoire d’une durée de 16 semaines a évalué la pratique de la méditation transcendantale en la comparant à des séances d’information et de discussions auprès de 84 patients présentant des troubles cardiovasculaires jugés stables. Des effets bénéfiques ont été observés en ce qui concerne la tension artérielle et la résistance à l’insuline dans le groupe de méditation. Il faudra toutefois d’autres études avant de se prononcer avec plus de certitude. L’utilisation de la méditation transcendantale par des patients souffrant de troubles cardiovasculaires pourrait par ailleurs améliorer quelques aspects du syndrome métabolique. Ce syndrome, caractérisé par divers facteurs de risques (hauts taux d’insuline et de cholestérol, hypertension et excès de poids) contribue à l’apparition de certaines maladies (diabète de type 2, troubles cardiovasculaires et accidents vasculaires cérébraux).

     

    Réduire l’hypertension. Publiée en 2008, une étude pilote a évalué l’effet de 8 semaines de méditation accompagnée de techniques de respiration chez 52 participants répartis au hasard en 2 groupes (méditation et groupe témoin). À la fin des traitements, une diminution significative de la tension artérielle (plus de 10 % par rapport au groupe témoin) a été observée.

    En 2004, une revue systématique de la littérature scientifique avait évalué l’effet de la méditation transcendantale dans le traitement de l’hypertension. Seulement 3 des 5 études répertoriées avaient permis d’observer des différences significatives entre les groupes d’intervention et les groupes témoins. Les études comportaient toutefois certaines faiblesses méthodologiques.

     

    Diminuer les symptômes dépressifs des femmes atteintes de fibromyalgie. Une petite étude contrôlée (91 participantes) a été publiée en 2007. Elle a évalué l’effet de 8 séances de méditation de pleine conscience (Mindfulness-Based Stress Reduction) d’une durée de 2 h 30 par rapport à un groupe témoin (liste d’attente). Une diminution significative des symptômes dépressifs a été rapportée chez les participantes du groupe méditation immédiatement à la fin des 8 séances ainsi qu’après une période de 2 mois.

     

    Aider les adultes ayant subi des sévices sexuels dans leur jeunesse. Vingt-sept adultes ayant survécu à des sévices sexuels dans leur enfance ont participé à un projet pilote. Après 8 semaines de méditation de pleine conscience (Mindfulness-Based Stress Reduction), des diminutions significatives des symptômes de dépression, de stress post-traumatiques et d’anxiété ont été observées et maintenues jusqu’à 24 semaines. Les auteurs mentionnent que les participants se sont montrés très assidus aux séances de méditation en classe et à la maison. Devant ces résultats prometteurs, ils suggèrent que d’autres études de plus grande envergure soient réalisées afin de mieux connaître les effets bénéfiques potentiels de la méditation.

     

    Cesser de fumer. Une étude pilote publiée en 2007a étudié la pratique de la méditation de pleine conscience (Mindfulness-Based Stress Reduction) auprès de sujets désirant cesser de fumer. Dix-huit personnes, fumant en moyenne 20 cigarettes par jour depuis 26 ans, ont participé à l’étude. Les sujets ont écouté sur un disque compact une séance de méditation de 45 minutes 1 fois par jour, 6 jours par semaine, pendant 8 semaines. Ils étaient aussi invités à ajouter des séances additionnelles au besoin. Ils devaient entreprendre de cesser de fumer à la 7e ou 8e semaine. Six semaines après leur arrêt initial, 56 % des personnes avaient maintenu leur abstinence. Les sujets qui, au départ, démontraient un plus grand intérêt à apprendre la méditation ont eu un taux de réussite plus élevé.

     

    Réduire les symptômes généraux de douleur chronique. En 2009, une revue systématique portant sur l’efficacité de la méditation de pleine conscience dans le traitement de la douleur chronique (provenant de la fibromyalgie, de l’arthrite rhumatoïde et d’autres sources) a été publiée. Au total, 10 études ont été incluses dans cette revue. Les auteurs concluent qu’il n’y a pas encore suffisamment de preuves pour déterminer l’ampleur des effets de la méditation pour aider les patients à diminuer la douleur chronique.

     

    Réduire les symptômes de douleur chronique chez les personnes âgées. En 2008, 2 revues systématiques portant sur l’efficacité de la méditation dans le traitement de la douleur chronique auprès des personnes âgées ont été publiées. En tout, une dizaine d’études ont été incluses et toutes étaient de courte durée, soit sur des périodes de 8 à 10 semaines. Les conclusions de ces revues suggèrent que la méditation peut être une intervention aidant à diminuer l’ensemble de la douleur chronique. Toutefois, comme elle est souvent accompagnée d’autres traitements et thérapies, son efficacité spécifique n’est pas clairement établie.

     

    Depuis, une autre étude pilote, réalisée auprès de 35 personnes âgées de plus de 65 ans souffrant de douleur lombaire chronique, a été publiée. Après avoir été divisées en 2 groupes, elles ont participé pendant 8 semaines à des séances hebdomadaires de méditation ou d’éducation sur la santé. Les sujets du groupe méditation étaient aussi invités à pratiquer quotidiennement à la maison. Les auteurs n’ont observé aucune différence significative entre les 2 groupes à la fin de l’étude et lors d’un suivi après 4 mois. De façon équivalente dans les 2 groupes, une diminution de l’intensité de la douleur et une augmentation des capacités fonctionnelles ont été notées.

     

    Contre-indications

      

    La méditation pourrait être néfaste chez les personnes atteintes d’épilepsie. Cette maladie se caractérise par des crises consécutives à une décharge électrique anormale, soudaine, excessive et transitoire dans le système nerveux central. Des études ont mesuré les changements neurochimiques et neurophysiologiques du cerveau induits par la méditation. À partir de ces observations, des chercheurs ont conclu que la méditation pourrait accroître le risque de contracter la maladie chez des sujets prédisposés ou d’augmenter la gravité et la fréquence des crises.

       

    Applications plus globales de la méditation

     

    Au-delà des vertus thérapeutiques de la méditation, voici quelques-uns de ses autres bénéfices potentiels. Plusieurs ont été confirmés depuis quelques années par des recherches de pointe, particulièrement en neurosciences. Celles-ci ont notamment permis de comparer l’activité cérébrale de méditants et de non-méditants à l’aide de techniques comme l’imagerie par résonance magnétique et les électroencéphalogrammes.

     

    Concentration et attention plus soutenues. La pratique de la méditation permettrait de rester longtemps et efficacement concentré sur une tâche ou un problème à résoudre. Quand une personne est très concentrée, ses ondes cérébrales de fréquence gamma se synchronisent et s’amplifient naturellement. Mais ces périodes durent rarement plus de 1 seconde à la fois. Des chercheurs ont constaté que les méditants de longue date arrivent à les faire durer plusieurs minutes.

     

    Amélioration des fonctions cognitives. Une étude a démontré qu’après 3 mois de méditation intensive, les personnes réussissent beaucoup mieux à des tests de réaction rapide à des stimuli visuels. Et ces nouvelles capacités demeureraient longtemps en place. Cela laisse supposer aux chercheurs que le cerveau serait relativement malléable (on parle de plasticité) et que la méditation pourrait « l’entraîner », à la manière d’un muscle. Une autre étude a observé des résultats similaires après seulement 4 jours de méditation de pleine conscience.

    Par ailleurs, les auteurs d’une autre étude ont découvert que le cerveau des personnes ayant médité pendant plusieurs années semblait devenir plus efficace. En effet, pour eux, l’accomplissement d’une tâche intellectuellement exigeante nécessite une moins grande activation des zones du cerveau concernées. De plus, leur cerveau serait moins perturbé par des stimuli extérieurs, qu’il s’agisse de pensées ou d’émotions. Il pourrait ainsi mieux concentrer son activité sur les tâches prioritaires.

     

    Plus de sentiments « positifs ». Quand on ressent des sentiments positifs (joie, curiosité, enthousiasme, fierté, etc.), l’activité électrique est prédominante dans une zone précise du cerveau (le cortex préfrontal gauche). Une étude utilisant l’imagerie par résonance magnétique a permis de découvrir qu’en état de méditation, cette zone s’active particulièrement. Selon les chercheurs, il se pourrait que la méditation favorise l’activité cérébrale des zones associées aux sentiments positifs tout en inhibant celles reliées à l’anxiété et aux sentiments négatifs. Ils émettent l’hypothèse que cela pourrait à la longue agir sur le tempérament et le rendre plus « positif ».

     

    Amélioration du système immunitaire. Au cours de l’étude citée précédemment, les chercheurs ont aussi constaté qu’à la suite d’une vaccination, le taux d’anticorps contre le virus de l’influenza était plus élevé chez les méditants que dans un groupe témoin. De plus, l’augmentation de ce taux était proportionnelle à celle de l’activité cérébrale dans la zone reliée aux sentiments positifs (le cortex préfrontal gauche).

     

    Diminution des coûts de santé. Une étude québécoise publiée en 2000 a permis de constater que, sur une période de 6 ans, les coûts de santé des pratiquants de la méditation transcendantale ont été en moyenne de 14 % inférieurs à ceux de non-méditants comparables. La méditation n’est probablement pas le seul facteur expliquant cet écart, mais elle y aurait contribué en bonne partie.

     

    Moins de rumination mentale. Deux études ayant porté sur des étudiants en période de stress ont été publiées en 2007 et en 2008. Dans les deux cas, les chercheurs ont constaté une diminution des pensées ruminantes néfastes, souvent associées à des états dépressifs. Ces conclusions ont été confirmées dans une autre étude et une méta-analyse subséquente. Des pensées comme les suivantes, quand elles se répètent sans cesse sont considérées comme « ruminantes » : je dois absolument comprendre ce qui m’arrive, je ne vais jamais m’en sortir, il vaudrait mieux que je m’isole, pourquoi suis-je si impuissant?, etc.

     

    Plus d’empathie envers les autres. Les gens qui méditent régulièrement ressentiraient plus d’empathie (la capacité de comprendre et de partager ce que vit une autre personne). Des chercheurs ont découvert que la zone du cerveau qui s’active quand les gens ressentent de l’empathie s’anime beaucoup plus chez les méditants expérimentés, en particulier quand ils sont en présence d’une personne en détresse.

     

    Plus de bonheur. Le professeur Richard Davidson est, depuis quelques années, le chef de file de l’étude du cerveau des méditants de longue date, incluant plusieurs moines tibétains. Professeur de psychologie et de psychiatrie à l’Université du Wisconsin à Madison, il y est le directeur des laboratoires de neurosciences et d’imagerie du cerveau. Selon lui, il est désormais clair que toute personne peut hausser son niveau général de bonheur grâce à un entraînement systématique. Cet entraînement, c’est la méditation. Richard Davidson prétend que le cerveau serait adaptable et transformable, ce qu’il nomma la « neuroplasticité ». Cette plasticité est désormais reconnue par la communauté scientifique. Et la méditation, en transformant le cerveau, ferait naturellement augmenter certaines qualités « nobles » comme la compassion, l’empathie, l’altruisme, la bonté et la clarté d’intention : toutes des qualités qui seraient associées au bonheur véritable.

     

    Matthieu Ricard, docteur en biologie cellulaire, moine bouddhiste et traducteur du dalaï-lama, partage cet avis. Méditant depuis plusieurs années, il a participé à plusieurs des expériences du professeur Davidson. Selon lui, si on peut s’entraîner pour jouer au tennis ou du piano, on peut aussi s’entraîner au bonheur, à la conscience, à la présence, à l’altruisme, à la bonté... On y parviendrait par la méditation, qui n’est rien d’autre que l’entraînement de l’esprit. Enfin, il croit que la méditation mène à l’action. Elle permet de construire d’abord sa force intérieure pour ensuite l’utiliser pour son propre bénéfice et celui de ses enfants, de sa famille, de ses amis et de toute la société.

      

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